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L’agriculture peut-elle sauver le climat ?

Depuis le 3 décembre, 196 parties (195 parties et l’Union européenne) négocient au Bourget près de Paris pour essayer de trouver un accord international qui, en limitant les émissions de gaz à effet de serre prévues d’ici 2100, permette de contenir le réchauffement climatique à +2°C maximum. Ce rendez-vous international est le 21ieme depuis la signature de la Convention Cadre des Nations Unies sur le changement climatique en 1992 à Rio par 154 Etats. Un premier protocole signé à Kyoto en 1997 (mais entré en application en 2004 seulement) avait engagé les pays développés dans un processus de limitation de leurs émissions d’origine industrielle principalement. L’objectif était de les réduire en moyenne de 5,2% en moyenne par rapport à 1990, sur la période 2008-2012.
Mais l’après-Kyoto a subi plusieurs échecs dont le plus sévère a été l’incapacité des pays à trouver un accord à Copenhague pour prolonger l’effort engagé par le protocole de Kyoto. L’objectif pour la COP21 est d’aboutir à un accord universel, impliquant tous les pays, développés et en développement, pour enrayer le réchauffement (l’atténuation) et pour financer l’adaptation au changement climatique, ce qui signifie de trouver au moins 100 milliards de $ par an.

L’agriculture est clairement concernée par les enjeux de la COP21. D’abord parce qu’elle est la principale victime du réchauffement ; ensuite parce que les activités agricoles sont aussi sources d’émissions de gaz à effet de serre. D’après le GIEC, l’agriculture contribue à 13,5% des émissions à l’échelle planétaire. Le Ministère de l’agriculture français évalue la contribution du secteur agricole aux émissions totales de la France à 20%.

D’où viennent ces émissions et comment les limiter ?

  • Pour le CO2, elles proviennent de l’utilisation d’énergie directe (fioul) et indirecte (fabrication des intrants par exemple) ;
  • Pour le méthane (CH4) les émissions proviennent des animaux par fermentation entérique et déjections ;
  • Pour le CO2 et le protoxyde d’azote (N2O), il s’agit d’émissions directes des sols liées à l’apport d’azote (fertilisation organique et minérale, et résidus de culture enfouis) et des émissions indirectes liées aux retombées atmosphériques d’ammoniac et au ruissellement des surplus azotés.

Le secteur agricole peut jouer donc sur trois volets : (i) limiter l’utilisation d’énergie, ou produire de l’énergie à partir de biomasse (biocarburants, biogaz,…) réduisant les émissions par effet de substitution à des énergies fossiles ; (ii) limiter le protoxyde d’azote avec des fertilisations azotées plus raisonnées ; (iii) ou jouer un rôle de puits de carbone en entretenant des sols riches en carbone ce qui suppose de maintenir les prairies et de limiter les actions de labour.

De façon opérationnelle, cela s’est traduit par des mesures concernant l’agriculture dans le plan climat 2004-2012 qui est le plan d’action de la France pour respecter ses engagements au titre du protocole de Kyoto (il est révisé tous les deux ans).

  • La maitrise des émissions azotées : programmes d’actions nitrates (bonne maitrise des fertilisants azotés entre autres), développement de projets pour mieux gérer les effluents d’élevage (collecte, stockage par exemple), développement de la méthanisation agricole ;
  • La réduction des émissions liées à l’élevage : PVE (plan végétal environnement), plan protéines végétales, plan énergie méthanisation autonomie azote ;
  • La gestion des émissions et les absorptions de carbone : PPE (plan performance énergétique visant à sensibiliser, réduire la consommation d’énergie et produire des énergies renouvelables) et le maintien et le développement de stocks de carbone dans le sol.

Mais la France est aussi à l’origine de l’initiative internationale 4 pour 1000 lancée quelques semaines avant l’ouverture de la COP à la FAO par le Ministre Le Foll. Elle met en avant qu’une amélioration de 0,4% par an du taux de matière organique dans les sols cultivés à l’échelle mondiale pourrait permettre de stocker 10% de nos émissions Cette initiative s’appuie sur le caractère gagnant-gagnant d’une telle stratégie puisqu’elle permettrait aussi d’améliorer la fertilité des sols et de lutter contre la désertification.

 

Et la PAC dans tout cela ?

Le changement climatique et son atténuation sont présents dans la PAC de manière renforcée depuis le Bilan de santé de la PAC de 2008, où ils avaient constitué au même titre que la production d’énergies renouvelables, la gestion de l’eau, la biodiversité, la restructuration du secteur laitier et l’innovation, les « nouveaux défis vitaux pour l’agriculture européenne ».

Dans les règlements actuels de la PAC, le verdissement des aides du premier pilier s’inscrit en partie dans les objectifs d’adaptation et d’atténuation du changement climatique principalement en favorisant le stockage du carbone via le maintien des prairies permanentes. L’obligation de constituer 5% de SIE (surfaces d’intérêt écologiques) comme des haies, bosquets sur les terres arables et de diversifier les cultures y contribue indirectement. Cependant, beaucoup de marges de manœuvre dans l’application de ces mesures ont été laissées aux Etats-membres et pour la plupart d’entre eux ne correspondent pas à des exigences additionnelles.
Dans le second pilier, les MAE « Mesures Agro-environnementales » ont été rebaptisées MAEC, C pour Climatiques pour indiquer l’importance donnée par l’Europe au rôle que l’agriculture peut jouer dans l’atténuation du réchauffement climatique.

La PAC soutient également, les PEI « Partenariat Européen d’Innovation » dont la mise en œuvre en France s’est traduite par les GIEE « Groupements d’intérêt économique et environnemental ». Les GIEE sont des collectifs d’agriculteurs reconnus par l’Etat qui s’engagent dans un projet pluriannuel de modification ou de consolidation de leurs pratiques. Les GIEE concernent par exemple la création d’unité de méthanisation collective ou encore la mise en place d’un « réseau bocage » par la plantation et la gestion de haies,…Ils constituent un levier intéressant de mise en commun de pratiques et s’inscrivent dans la Loi d’orientation agricole française prônant l’agroécologie. Leur évaluation pourra être faite d’ici quelques années, espérons qu’ils impulsent des projets et ne souffrent pas d’un effet d’aubaine auprès d’agriculteurs qui dans tous les cas auraient développés leurs projets…affaire à suivre !

Enfin, il faudra peut-être s’intéresser à la question de l’élevage, très attaquée par certaines ONG sur le thème « manger de la viande c’est réchauffer la planète ». Pour l’instant, l’Europe s’est bien gardée d’aborder frontalement cette question.

Quelques références à découvrir

 

Dossier de presse : COP21 : L’agriculture et la forêt au coeur de la solution climatique

cop21

 

Vidéo de S.Le Foll, Ministre de l’agriculture sur Agriculture et changement climatique Le Foll

Quelle contribution de l’agriculture française à la réduction des émissions des gaz à effet de serre ? Potentiel d’atténuation et coût de 10 actions techniques. Synthèse du rapport de l’étude réalisée par l’INRA pour le compte de l’ADEME, du MAAF et du MEDDE – Juillet 2013

inra

 

FNSEA et cop21 (vidéo de la vice-présidente de la fnsea)

GIEE, 1, 2, 3, partez ! actu capeye

 

Lecole Pauline et Thoyer Sophie

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