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Processus écologiques

Agriculture de conservation et érosion

La lutte contre l'érosion[2] est à l'origine du développement de l'Agriculture de Conservation[3] (AC) à travers le monde. C'est aux États-Unis, dans les années 1930, que les techniques de conservation des sols sont apparues pour faire face aux « dust bowl », nuage de poussière résultant d'un travail du sol intensif (labour[1]).

Dans un champs vallonné, l'érosion a eu lieu en bas de pente et est indiqué par une fléché

En AC, de nombreuses études montrent que la stabilité structurale du sol est améliorée. En non-labour, la matière organique[5] (MO) s'accumule dans les premiers centimètres du sol. Sa minéralisation[4] est donc plus faible et elle permet de stabiliser les agrégats. De plus, sa portance augmente car l'absence de porosité mécanique en profondeur limite les tassements.

Travail très superficiel du sol avec une machine

Remarque

  • De nombreux auteurs ont établi que la stabilité structurale des sols est corrélée positivement au taux de carbone organique. Ainsi, l'impact des TCSL est d'autant plus marqué pour l'horizon de surface qui concentre les matières organiques.

  • La mise en place des TCSL est possible sur les cultures d'hiver, mais cela est plus compliqué pour les cultures de printemps. En effet, une baisse des rendements est observée lorsque les TCSL sont appliquées sur ces cultures car elles sont plus exigeantes lors de la phase de germination.

La MO est en partie fournit par les couverts végétaux[8], via l'utilisation de mulchs vivants ou morts. Ce système permet de protéger la surface du sol des dégradations superficielles provoquées par la pluie ou le vent. Les couverts constituent donc un obstacle à l'écoulement de l'eau. Celle-ci s'infiltre[6] dans le sol au lieu de ruisseler[7] à sa surface.

photo d'un sol couvert

De même, les rotations[9] et associations culturales sont importantes. En effet, les cultures à systèmes racinaires développés, tels que la luzerne ou le ray grass, peuvent participer à une meilleure cohésion du sol .

Association blé-vesce dans un champ

Remarque

  • Pour avoir de bons résultats en termes de réduction de l'érosion, il est important de disposer d'un taux de couverture suffisant (minimum allant de 25% à 40% de la surface du sol) et de systèmes racinaires développés. En l'absence de couverture du sol, l'efficacité des TCSL est plus controversée. En effet, les TCSL seules ne suffisent pas. C'est la combinaison des trois principes de l'AC qui permet d'obtenir de bons résultats.

Exemple

  • Dans les régions humides et tropicales comme le Brésil, le climat est assez agressif et les sols sont souvent soumis à l'érosion. Par exemple, dans le Cerrado, région de savane au Brésil, le climat est humide. Les précipitations annuelles varient entre 1200 et 2000 mm et sont concentrées sur 6 à 8 mois de l'année. L'AC est dans ce cas très utile pour lutter contre l'érosion des sols. En absence de labour, des études ont pu mettre en évidence une diminution du facteur d'érosion allant de 2 à 20, suivant la pente et la texture du sol. Il est également connu que dans les régions tropicales, les mulchs avec des résidus de cultures sont particulièrement efficaces pour contrôler les phénomènes d'érosion. En effet, cela permet de répartir l'impact provoqué par les averses et de réduire le flux final. La couverture des sols dans ces régions permet de réduire l'érosion de 0 et 85 % .

  • Dans les régions tempérées, comme la France ou plus globalement en Europe, une analyse bibliographique basée sur 22 références françaises et européennes, a démontré qu'en comparaison avec le labour, un pseudo-labour permet de réduire l'érosion dans 83% des cas. Le travail superficiel la réduit dans 90% des cas et le semis direct dans 85% des cas. À partir des mêmes références, en semis-direct, l'érosion est ainsi réduite d'un facteur supérieur à 5, dans plus de 60% des cas. De manière générale, la réduction du travail du sol permet de réduire l'érosion d'un facteur allant de 2 à 10 et la couverture du sol peut la réduire d'un facteur de 1 à 10 .

Remarque

Une croute de battance, on voit le sol craquelé

Ainsi, les trois grands principes de l'AC (perturbation minimale des sols, couverture permanente des sols, diversification des rotations et association de cultures) permettent d'améliorer la résistance du sol à l'érosion hydrique ou éolienne.

Attention

Dans la majorité des cas, le premier principe de l'AC est favorisé aux dépens des deux autres. Toutefois, en plus de la limitation du travail du sol, les deux autres principes sont essentiels pour limiter l'érosion, notamment la présence d'un couvert végétal.

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Références bibliographiques :

Arvalis Institut du végétal et al., 2007[12]

Blanchart et al., 2004[13]

Bordes & Richard, 2014[14]

Chambre régionale d'agriculture de Midi-Pyrénées, 2006[15]

Chapelle-Barry, 2008[16]

FAO, 1994[17]

FAO, 2014[18]

Schaller, 2013[19]

Scopel et al., 2013[20]

Six et al., 2002[21]

Soane et al., 2012[22]

Auteurs : Lucile Bretin, Marjorie Bru, Auriane Eysseric

Supervisions et corrections : Sarah Clerquin, Joséphine Peigné, Jean-François Vian, Eric Blanchart, Stéphane de Tourdonnet

  1. Labour

    Technique de travail du sol visant à ouvrir le sol et le retourner avant le semis (Bourgeois M., Coquillart E., Cournarie M., Fassino C. Site PEPITES 2014).

  2. Erosion

    Processus de dégradation et de transformation du relief causé par un agent externe comme le vent et la pluie (Bourgeois M., Coquillart E., Cournarie M., Fassino C. Site PEPITES 2014).

  3. Agriculture de conservation

    L'agriculture de conservation est une forme innovante d'agriculture fondée sur la diminution – voire la suppression – du travail du sol, le maintien d'un couvert végétal permanent sur le sol et la diversification des successions et associations de plantes (Bourgeois M., Coquillart E., Cournarie M., Fassino C. Site PEPITES 2014).

  4. Minéralisation

    Transformation de la matière organique en matière minérale. Les micro-organismes sont les principaux minéralisateurs (Bourgeois M., Coquillart E., Cournarie M., Fassino C. Site PEPITES 2014).

  5. Matière organique

    Matières animales et végétales qui ont subi une décomposition permettant l'obtention d'humus. C'est un des éléments essentiels à la structure du sol (Bourgeois M., Coquillart E., Cournarie M., Fassino C. Site PEPITES 2014).

  6. Infiltration

    Pénétration des eaux dans les sols (Arvalis Institut du végétal et al., 2007).

  7. Ruissellement

    Écoulement des eaux à la surface des sols (Arvalis Institut du végétal et al., 2007).

  8. Couvert végétal

    Le couvert végétal (repousses ou espèces implantées) présent pendant l'interculture peut avoir plusieurs appellations selon les objectifs qu'on lui donne. Il s'appelle CIPAN (culture intermédiaire piège à nitrates) s'il a la fonction d'éviter la lixiviation des nitrates. On parle d'engrais vert quand le couvert permet de fournir des éléments nutritifs à la culture suivante ou s'il joue le rôle d'amendement. Enfin, il s'appelle culture en dérobée si le but est une production de fourrage ou de graines. Si les couverts végétaux sont bien gérés, les avantages agronomiques et environnementaux sont multiples (Joséphine Ghesquière (ITAB/ ISA Lille), Adeline Cadillon (ITAB/ISARA-Lyon), Laetitia Fourrié et Laurence Fontaine (ITAB)).

  9. Rotation

    Fait de diversifier les cultures successives et les couverts végétaux (Bourgeois M., Coquillart E., Cournarie M., Fassino C. Site PEPITES 2014).

  10. Croûte de battance

    Croûte dure et lisse qui "ferme" la surface du sol, formée suite à une forte pluie (Bourgeois M., Coquillart E., Cournarie M., Fassino C. Site PEPITES 2014).

  11. Effet splash

    Impact des gouttes d'eau sur le sol (Blanchart et al., 2004 ; Arvalis Institut du végétal et al., 2007).

  12. Arvalis institut du végétal et al., 2007

    ARVALIS INSTITUT DU VEGETAL, AREAS, INRA DE DIJON, AGROPARISTECH, INRA DE PARIS GRIGNON. Evaluation des impacts environnementaux des Techniques Culturales Sans Labour (TCSL) en France. Rapport de synthèse des impacts environnementaux des TCSL par milieu [en ligne]. 2007, 56 p. Disponible sur : http://www2.ademe.fr/servlet/getDoc?cid=96&m=3&id=51256&p1=00&p2=11&ref=17597 [Consulté le 08 avril 2014].

  13. Blanchart et al., 2004

    BLANCHART E., ALBRECHT A., BROWN G., DECAENS T., DUBOISSET A., LAVELLE P., MARIANI L., ROOSE E. Effects of tropical endogeic earthworms on soil erosion: a review. Agriculture, Ecosystems and Environment [en ligne]. 2004, Vol. 104, pp. 303-315. Télécharger l'article [Consulté le 08 avril 2014].

  14. Bordes & Richard, 2014

    BORDES J. P., RICHARD G. Travail du sol et durabilité des systèmes agricoles : introduction. Faut-il travailler le sol ? Colloque. Paris XII, 3 avril 2014.

  15. Chambre régionale d'Agriculture de Midi-Pyrénées, 2006

    CHAMBRE REGIONALE D'AGRICULTURE DE MIDI-PYRENEES. Travail du sol sans labour. Bilan des suivis 2001-2004 en Midi-Pyrénées [en ligne]. Synthèse technique. Midi-Pyrénées, 2006, 24 p. Disponible sur : www.mp.chambagri.fr/IMG/pdf/synt_thema_v5-1.pdf [Consulté le 11 avril 2014].

  16. Chapelle-Barry, 2008

    CHAPELLE-BARRY C. Dans le Sillon du non-labour. Agreste Primeur [en ligne]. 2008, n°207, pp 1-4. Disponible sur : http://agriculture-de-conservation.com/Dans-le-sillon-du-non-labour.html [Consulté le 11 avril 2014].

  17. FAO, 1994 (b)

    FAO. Archives de documents de la FAO. Introduction à la gestion conservatoire de l'eau, de la biomasse et de la fertilité des sols (GCES) - Introduction. FAO Soils Bulletin [en ligne]. Équateur. 1994 (version 70) Disponible sur : http://www.fao.org/docrep/T1765F/T1765F00.htm [Consulté le 11 avril 2014].

  18. FAO, 2014

    ORGANISATION DES NATIONS UNIES POUR L'ALIMENTATION ET L'AGRICULTURE (FAO). Département de l'agriculture et de la protection des consommateurs - Agriculture de conservation - Qu'est ce que l'agriculture de conservation [en ligne]. Disponible sur : http://www.fao.org/ag/ca/fr/1a.html [Consulté le 31 mars 2014].

  19. Schaller, 2013

    SCHALLER N. L'agriculture de conservation, Centre d'études et de prospective-Analyse [en ligne]. 2013, n°61, pp. 1-4. , 2013, n°61, pp. 1-4. Disponible sur : http://agriculture.gouv.fr/Analyse-no61-septembre-2013-L [Consulté le 08 avril 2014].

  20. Scopel et al., 2013

    SCOPEL E., TRIOMPHE B., AFFHOLDER F., DA SILVA F. A. M., CORBEELS M., XAVIER J. H. V., LAHMAR R., RECOUS S., BERNOUX M., BLANCHART E., DE CARVALHO MENDES I., DE TOURDONNET S. Conservation agriculture cropping systems in temperate and tropical conditions, performances and impacts. A review, Agronomy for Sustainable Development, 2013, Vol. 33, pp. 113-130.

  21. Six et al, 2002

    SIX J., FELLER C., DENEF K., OGLE S.M., DE MORAES SA J. C., ALBRECHT A. Soil organic matter, biota and aggregation in temperate and tropical soils – Effects of no-tillage. Agronomie Publisher EDP Sciences [en ligne]. 2002, Vol. 22, n°7-8, pp. 755-775. Disponible sur : http://hal.archives-ouvertes.fr/hal-00885974/ [Consulté le 11 avril 2014].

  22. Soane et al., 2012

    SOANE B.D., BALL B.C., ARVIDSSON J., BASCH G., MORENO F., ROGER-ESTRADE J. No-till in northern, western and south-western Europe: A review of problems and opportunities for crop production and the environment. Soil & Tillage Research, 2012, Vol. 118, pp. 66-87.

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