Définition :
L'intéressement est le processus par lequel les relations entre les acteurs identifiés sont stabilisées. Les associations et les alliances à sceller sont définies au cours de cette étape.
Selon M. Callon, il s'agit de « l'ensemble des actions par lesquelles une entiteĢ s'efforce d'imposer et de stabiliser l'identité des autres acteurs qu'elle a défini par sa problématisation. »
Cela se fait notamment en se dissociant de tous les autres acteurs potentiellement concurrents, porteurs d'autres projets et associés à d'autres problématisations.
Application à l'AC
Les traducteurs vont donc devoir intéresser les agriculteurs, la société civile en moindre mesure, mais aussi et surtout le sol. Pour cela, ils vont devoir se dissocier du labour, de la charrue, mais aussi de tous les autres acteurs associés à d'autres innovations concurrentes.

Intéresser le sol :
Il s'agit de proposer un attirail de dispositifs et d'outils adaptés, permettant effectivement de ne pas travailler le sol et le laisser "travailler" seul, grâce aux acteurs naturellement présent en son sein (lombrics, microflore ...). Il faut également dissocier l'AC[2] de l'agriculture biologique : quoique légitime, cette dernière n'est pas suffisamment performante pour la conservation du sol.
Intéresser les agriculteurs :
Tout d'abord, les traducteurs s'efforcent de couper les ponts avec d'autres entités concurrentes, comme les acteurs de la recherche et du développement agricole plus "conventionnel", les vendeurs de matériels agricoles. Par exemple, ces derniers sont présentés comme hostiles à l'AC[2], du fait de la chute de l'achat du matériel due labour que cela engendrerait.
Ensuite, l'efficacité de l'innovation proposée doit être prouvée et documentée. Les journées de formation, organisées et animées par les traducteurs ont ce but. Généralement composée d'une matinée théorique en salle et d'une après-midi dans un champ, ces formations s'appuient sur nombre de supports (photos, tableaux, graphiques), mais aussi sur l'observation de fosses pédologiques.
Elles reflètent bien le rôle et l'identité des traducteurs : une interface entre les connaissances scientifiques et les pratiques techniques. C'est au cours de ces journées que se scellent les alliances entre le sol, les agriculteurs et les traducteurs, participant ainsi au processus d'intéressement.
Intéresser la société civile ?
Ce n'est pas vraiment le public ciblé par les traducteurs. Ils y font plutôt référence comme un des acteurs qui, étant intéressé par la protection de la nature, sera évidemment favorable à l'AC[2].
Auteur : Laetitia STROESSER
Sources principales : Frédéric Goulet, L'innovation par retrait : configuration des collectifs sociotechniques et de la nature dans le développement de techniques culturales sans labour, novembre 2008 et Hèlène Brives, chapitre 2
Superviseurs : Stéphane DE TOURDONNET, Hélène BRIVES, Sarah CLERQUIN