L'analyse et la gestion du risque phytosanitaire : Quels sont les connaissances scientifiques et les outils indispensables ?

Eradiquer ou limiter la progression de la virose

Les stratégies d'éradication

Lorsque le virus a été introduit récemment dans une nouvelle zone et que la virose présente une distribution géographique encore limitée, une tentative d'éradication[1] peut être menée. Des actions de ce type sont ou ont été menées en Amérique du Nord (éradication réussie ou en cours) et au Japon (en cours). Elles font souvent appel à des stratégies de lutte extrêmement sévères pouvant potentiellement amener à une déstabilisation de la filière de production si les conditions ne sont pas réunies. Une analyse technico-économique est donc essentielle avant toute mise en œuvre de tels programmes.

Les stratégies d'éradication nécessitent une surveillance intensive des pépinières[2], des vergers de production et de tous les Prunus hôtes isolés présents à l'état sauvage ou cultivé (jardins, parcs, zones urbaines...). Les actions d'éradication entreprises dans l'état de Pennsylvanie aux États unis par exemple ont consisté à tester par ELISA (individuellement ou par groupe de 4 arbres) près de 2 millions d'arbres sur 11 années. La surveillance est poursuivie depuis 2010 pour s'assurer de l'éradication définitive du virus dans cet état. Les mesures de lutte comprenaient la mise en quarantaine de surfaces importantes desquelles aucun plant de Prunus ne pouvait sortir. En cas de détection de cas de maladie, tous les Prunus situés dans un rayon de 500 m étaient éliminés.

Le tableau présente le nombre d'échantillons prélevés et analysés dans le cadre de la campagne d'éradication du PPV dans l'état de Pennsylvanie entre 2000 et 2009. En 2000, 399 échantillons ont été trouvés infectés par le PPV sur 52562 prélevés (0.776). Le nombre d'échantillons prélevés a augmenté chaque année pour atteindre 231062 en 2008 et 215358 en 2009. Entre 2004 et 2006, le nombre d'arbres trouvés infectés chaque année était inférieur à 7 et depuis 2007, aucun arbre n'a été trouvé infecté, malgré un échantillonnage intensif. La maladie a été déclarée éradiquée en Pennsylvanie en octobre 2009, soit 10 ans après sa première détection.
Echantillons prélevés et analysés au cours de la campagne d'éradication du PPV dans l'état de Pennsylvanie (USA)

Les stratégies de limitation de la progression de la virose : exemple de la France

Lorsque la maladie est déjà très étendue, une stratégie d'éradication ne peut généralement pas être réalisée sans risquer de déstabiliser durablement la filière de production.

Dans cette situation, une stratégie visant à limiter la dispersion de la virose et à maintenir la proportion d'arbres malades en dessous d'un certain seuil (considéré comme économiquement acceptable) peut être mise en œuvre. Certains pays comme la France, l'Italie ou encore la Suisse sont actuellement engagés dans cette démarche.

En France, le dispositif de surveillance et de lutte est défini dans le cadre d'un arrêté national de lutte. Vous pouvez le consulter en cliquant ici.

Il comprend différents acteurs (DGAL, SRAL, FREDON et FEDON, CTIFL, pépiniéristes, arboriculteurs).

Le schéma présente les différents acteurs institutionnaux et professionnels impliqués dans la gestion de la sharka en France. Les actions de surveillance et de lutte sont définies par la directive 2000/29/CE (production et échanges de plants), un arrêté national de lutte parfois complété par un arrêté préfectoral. Les acteurs institutionnels (encadrés jaunes) sont le ministère de l'agriculture (DGAL) et les SRALs . Ces derniers délèguent les ativités de surveillance des vergers et de l'environnement des pépinières aux FREDONS et FEDONs. Les SRAL sont impliqués dans le contrôle et la délivrance des permis d'importation et d'exportation du matériel végétal sensible. Ils surveillent aussi les pépinières et délivrent le passeport phytosanitaire européens (PPE). Les acteurs professionnels (encadrés verts) sont les pépiniéristes (production de plants sous PPE, le CTIFL pour la production de plants certifiés et les arboriculteurs qui participent à la surveillance et appliquent les décisions d'arrachage des arbres/ vergers contaminés par le virus.
Les acteurs impliqués dans la gestion de la sharka en France

Outre les contrôles stricts effectués dans les pépinières et dans leur environnement, des mesures spécifiques de lutte sont mises en place dans les vergers. La surveillance des vergers est basée sur la recherche de symptômes de maladie et la fréquence des inspections dépend essentiellement de la distance aux cas de maladie trouvés l'année n-1.

Ce schéma (séries de cercles positionnés autour d'un cas connu de contamination) présente les modalités de surveillance à mettre en œuvre comme définies dans l'arrêté national de lutte. L'intensité de la surveillance varie selon la distance aux cas connus de virose. Dans la zone focale (1,5 km de rayon), 2 contrôles /an doivent être réalisés au minimum et 3 contrôles si l'incidence de la virose dépasse 2% sur une surface de 1Km2 centrée sur les cas de maladie détectés à l'année n-1. Dans la zone de sécurité (entre 1,5 Km et 2,5 Km), 1 passage annuel doit être réalisé. Dans les zones non connues pour être contaminées, 1 surveillance doit être réalisée tous les 6 ans.
L'intensité de la surveillance varie selon la distance aux cas connus de virose

Pour limiter la dissémination de la virose, les arbres malades doivent être rapidement éliminés après leur détection et la totalité du verger arrachée si la proportion d'arbres symptomatiques à l'année n dépasse 10%. Ce seuil peut cependant être abaissé si nécessaire après analyse de risque ciblée. Enfin, la plantation/ replantation de nouveaux vergers n'est autorisée que sous certaines conditions.

Pour en savoir plus sur la gestion de la virose en France, vous pouvez écouter l'interview de Christine Colas du SRAL Languedoc-Roussillon et consulter l'arrêté national de lutte.

Vidéo Christine COLAS 6
  1. Eradication

    Application de mesures phytosanitaires afin d'éliminer un organisme nuisible d'une zone géographique donnée

  2. Pépinières

    Cultures de vigne destinées à la production de racinés ou de greffés-soudés.

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